Par Ali Bachir Dori à Niamey
Niger : l’armée s’incline devant un activiste, une souveraineté nationale humiliée
Il y a des scènes qui laissent perplexe, des événements si absurdes qu’ils en deviennent presque comiques s’ils n’étaient pas aussi inquiétants. Ibrahim Maïga, un activiste burkinabé sans fonction officielle, ni au Burkina Faso ni au Niger, a été reçu par des militaires nigériens pour leur dispenser des « conseils ». Oui, vous avez bien lu. Un simple activiste, sans formation militaire, sans expérience sur le terrain, s’adressant à des officiers censés être les garants de la sécurité d’un pays en guerre.
- Politique
![Crédit Photo : PRN](https://www.lsi-africa.com/miniature/niger-junte-activiste-5336-1306934.jpg)
Crédit Photo : PRN
Peut-on imaginer un seul instant que les États-Unis, Israël ou la Turquie ouvrent leurs casernes à un militant sans la moindre expertise militaire pour venir prêcher ses théories ? Peut-on concevoir que de véritables armées, engagées dans des combats contre des menaces réelles, accordent du crédit aux discours d’un homme qui n’existe que sur les réseaux sociaux ? Pourtant, c’est exactement ce qui se passe au Niger, où le palais présidentiel de Niamey semble être devenu une sorte de QG pour activistes en quête de tribune.
Une junte en quête de repères
Lorsque la junte militaire a renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum le 26 juillet 2023, elle déclarait avoir fait cela au nom de la souveraineté et de la lutte contre le terrorisme. Huit mois plus tard, le bilan est accablant. Non seulement les attaques djihadistes n’ont pas cessé, mais elles se sont intensifiées, faisant des dizaines de victimes parmi les forces armées nigériennes. Pendant ce temps, au lieu de renforcer leur armée avec des experts en stratégie militaire, les dirigeants de l’Alliance des États du Sahel (AES) préfèrent écouter des activistes dont les solutions se limitent à des slogans et des discours anti-impérialistes.
Mais ce n’est pas tout. Pendant que l’armée écoute les prêches d’un militant, le pays plonge dans une crise sociale et économique inquiétante. Dans le secteur de l’éducation, les enseignants contractuels ont cessé le travail, faute de paiement de leurs salaires. À cela s’ajoute une grève des Appelés du Service Civique National (ASCN) du ministère de l’éducation nationale à compter du 10 février 2025. Tandis que le gouvernement peine à payer ses fonctionnaires, il trouve pourtant le temps et les ressources pour organiser des conférences avec des influenceurs autoproclamés.
Slogans contre réalité
Quelle solution miracle un simple activiste peut-il bien proposer pour lutter contre le terrorisme ? Un discours enflammé contre l’Occident ? Une diatribe contre les « ennemis de l’Afrique » ? Si les mots suffisaient à remporter des guerres, le Niger serait déjà en paix. Mais la réalité est toute autre. Lutter contre le terrorisme exige une armée bien formée, des stratégies solides, des alliances fiables et un équipement adéquat. Au lieu de cela, le régime en place s’enfonce dans une logique où les symboles et les slogans remplacent l’action concrète.
Ce qui est le plus troublant dans cette affaire, ce n’est pas tant qu’un activiste cherche à exister politiquement – après tout, c’est son métier. Ce qui est dérangeant, c’est qu’un gouvernement censé être pragmatique, face à une menace existentielle, donne du crédit à de telles mascarades. Cela en dit long sur l’état du pouvoir actuel au Niger.
Un avenir incertain
Combien de soldats nigériens sont morts depuis le coup d’État ? Combien de civils ont été victimes d’attaques djihadistes ? Combien d’écoles ont fermé à cause de l’insécurité ? Ce sont ces questions qui devraient occuper les dirigeants du Niger. Mais au lieu de cela, on invite un influenceur à jouer au stratège militaire. Si le pouvoir actuel souhaite réellement redonner au Niger sa souveraineté, il ferait bien de commencer par assumer ses responsabilités. Gouverner, c’est agir, pas faire de la communication. Pendant que la junte militaire transforme le palais présidentiel en tribune pour activistes, les Nigériens, eux, attendent des réponses. Pour l’instant, ils n’ont droit qu’à des discours creux et à des promesses illusoires.
Commentaires
Vous souhaitez pouvoir ajouter un commentaire à l'article Niger : l’armée s’incline devant un activiste, une souveraineté nationale humiliée , ou faire profiter de votre expérience avec les internautes, ajoutez votre commentaire il sera mis en ligne après validation par notre équipe
Votre commentaire a bien été prise en compte, notre équipe vous envoi un mail de confirmation une fois mis en ligne.
Votre commentaire est en attente de modération. Voir votre commentaire