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CRISE

Crise politique en RDC: début de débandade dans les rangs de Joseph Kabila

Chef en retrait et début de débandade dans les rangs: l'ancien président congolais Joseph Kabila, qui n'excluait pas un retour en 2023, reste absent et ses troupes commencent à se diviser sous le coup de l'offensive de son successeur Félix Tshisekedi.

Crédit Photo : JOHN WESSELS
Crédit Photo : JOHN WESSELS

Le président de la République démocratique du Congo Joseph Kabila, le 30 septembre 2018 à Kinshasa.

M. Tshisekedi a sifflé la fin de la coalition qu'il formait depuis janvier 2019 avec M. Kabila, homme fort de la République démocratique du Congo pendant 18 ans. Au Parlement, il a demandé le renversement de la majorité fidèle à son prédécesseur, pour mettre en oeuvre sa propre politique de réformes soutenue par les Etats-Unis et l'Union européenne (lutte contre la corruption, paix dans l'Est). Après le discours de M. Tshisekedi le 6 décembre, son prédécesseur a bien fait sa première déclaration publique en deux ans. Mais il n'a pas dit grand-chose: "On m'a dit que vous me cherchiez. Aujourd'hui je ne suis pas venu pour un meeting. Je suis juste venu vous saluer", a lancé M. Kabila le 11 décembre à des supporteurs à Kolwezi, au premier jour de sa tournée dans son fief du Katanga.

Le "Raïs" (son surnom), 49 ans à peine, n'excluait pas de revenir aux affaires en 2023, date prévue pour la prochaine élection. "Dans la vie comme en politique, je n'écarte rien", déclarait-il en décembre 2018 avant de céder le pouvoir. "Pour le moment, il n'est pas dans la politique active", affirme à l'AFP l'un de ses fidèles, son conseiller diplomatique Barnabé Kikaya bin Karubi, qui confirme que M. Kabila n'a pas l'âge de faire le deuil du pouvoir. M. Kabila est-il fragilisé? Dans un blog lundi, M. Kikaya a dénoncé "une volonté délibérée de neutraliser" Joseph Kabila, voire de le livrer à la Cour pénale internationale (CPI).

 Protégé par la loi 

L'Union européenne vient de reconduire pour un an les sanctions décrétées contre onze de ses proches fin 2016 pour entrave au processus électoral et violations des droits de l'Homme. Avant de quitter le pouvoir, M. Kabila avait pris soin de promulguer une loi sur le statut des anciens présidents de la République. Cette loi, qui n'existe que pour lui seul, le protège contre toute "poursuite pénale" pour des actes commis dans l'exercice de ses fonctions. Elle lui garantit aussi également des revenus et des avantages matériels, qui font grincer quelques dents.

Un ancien de la Banque mondiale et ex-candidat à la présidentielle, Noël Tshiani, affirme vouloir saisir la Cour constitutionnelle pour "annuler la paie exorbitante de Joseph Kabila". Des indemnités que M. Tshiani chiffre à plusieurs centaines de milliers de dollars mensuels. Avant de se retirer, M. Kabila, militaire de formation, avait aussi installé en août 2018 un nouveau chef d'état-major des armées, Célestin Mbala. Signe d'une certaine stabilisation, l'armée se déclare aujourd'hui "républicaine" et affirme donc n'obéir qu'à son commandant en chef suprême: l'actuel président. Avant de transmettre pacifiquement le pouvoir à M. Tshisekedi, une première dans l'histoire du pays, M. Kabila avait lancé sa machine de guerre politique, le Front commun pour le Congo (FCC).

Le FCC revendiquait jusqu'à présent une majorité de plus de 300 députés sur 500. Cette majorité a volé en éclats pour la première fois avec le vote sur la destitution de la présidente pro-Kabila de l'Assemblée Jeanine Mabunda, par 281 voix, le 10 janvier. Comme souvent en RDC, l'ombre de la fraude et de la corruption plane sur la nouvelle donne. Le FCC affirme que des députés issus de ses rangs ont été achetés. Un député s'est félicité de façon un peu confuse dans une vidéo d'avoir reçu au moins 15.000 dollars.

Le mouvement citoyen "les Congolais Debout" "condamne fermement les révélations d'une possible corruption des députés". Reste que le FCC est ébranlé depuis le discours du président Tshisekedi et par le silence de son "autorité morale", Joseph Kabila, pourtant invité par ses fidèles à livrer sa "part de vérité" sur la crise politique. Au moins un gouverneur FCC (dans la province du Sud-Kivu) a fait part de sa volonté de soutenir l'"union sacrée" prônée par M. Tshisekedi autour de sa nouvelle majorité. La semaine dernière, six sénateurs du FCC ont demandé la "démission" des "caciques" du parti, à commencer par celle de Néhémie Mwilanya, ancien directeur de cabinet du "Raïs"...

Samir Tounsi

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