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Rosalie Matondo: son parcours, son amour pour la nature, et l’Économie forestière au Congo

Titulaire d’un doctorat ès sciences agronomiques en biotechnologie des plantes, Rosalie Matondo vient de boucler sept années au sein du gouvernement congolais. La ministre de l’économie forestière est revenue dans cet entretien exclusif, sur son parcours, sa longévité au sein de l’équipe gouvernementale, son amour pour la nature et l’environnement, et se projette sur les nombreux chantiers en cours au sein de son département ministériel. 

Crédit Photo: RM.
Crédit Photo: RM.

Rosalie Matondo, ministre de l’Économie forestière de la république du Congo.

LSI AFRICA : le 6 mai 2023, vous avez totalisé sept ans au sein du gouvernement congolais. Que traduit selon vous cette longévité dans l’équipe gouvernementale ?

Rosalie MATONDO: la longévité de sept ans au sein du gouvernement congolais ne reflète que la volonté de la plus haute autorité de notre pays, j’ai cité Son Excellence Monsieur Denis SASSOU-N’GUESSO, Président de la République, Chef de l’Etat, qui est le seul disposant du pouvoir discrétionnaire de nommer un cadre à une haute fonction. Cela traduit certainement la confiance accordée face au travail que j’accomplis et à ma contribution au sein de l'équipe gouvernementale. Cela peut être également le fruit de mon expertise et de ma connaissance du domaine dans lequel j'opère, ainsi que de ma capacité à maintenir des relations de travail solides avec mes collègues et toutes les parties prenantes.

La jeune élève du lycée Révolution a-t-elle imaginé à l’époque endosser une telle responsabilité ? En aviez-vous rêvé ?

Il est à noter que la jeune élève du lycée Révolution n'ait pas nécessairement envisagé à l'époque de prendre une telle responsabilité, une telle fonction –car, à mon humble avis les aspirations et les ambitions ne peuvent concernées que le rêve de prouver son expertise dans un domaine donné et non une haute fonction politique nominative.

Vous êtes détentrice d’un doctorat ès sciences agronomiques en biotechnologie des plantes. D’où vous vient cet « amour » pour la nature et l’environnement ? 

Vous avez pleinement raison de mettre en exergue le vocable « amour » ! Effectivement, mon "amour" pour la nature et l'environnement est un héritage que je tiens avant tout de mon père, qui m’a initié très jeune à soigner les plantes présentes dans notre entourage et dans les champs. C’est ensuite le résultat de ma formation universitaire en sciences agronomiques et en biotechnologie des plantes, ainsi que mon cursus professionnel. Au cours de mes études, j'ai développé une compréhension approfondie de l'importance des systèmes biologiques et de leur interaction avec les autres composantes de la nature, qui constituent l’essence des écosystèmes naturels dans lesquels nous devrions vivre en harmonie. A ce titre, nous avons tous l’obligation de préserver la nature et ses differentescomposantes afin d’assurer la durabilité et le bien-être de notre planète. La chance de travailler pour l’optimisation des écosystèmes forestiers et les connaissances acquises m'ont incitées à m'investir davantage dans ce domaine et à chercher des moyens d'apporter des contributions positives.

Sept ans au ministère de l’économie forestière, où en est le Congo Brazzaville dans ce domaine ? Comment définissez-vous l’économie forestière pour un internaute non averti ?

Le Congo possède d’importantes ressources forestières constituées d’environ trois cents essences de bois d’œuvre et de nombreux produits forestiers non ligneux, dont la valorisation optimale devrait largement contribuer à la diversification de l’économie nationale. Il faut rappeler qu’à ce jour, la contribution du secteur forestier au PIB est de l’ordre de 5-6%. L'économie forestière englobe les activités liées à l'exploitation forestière à impact réduit, la gestion et la conservation de la biodiversité faunique et floristique, l’afforestation et le reboisement, le tout sur fond de gestion durable par le biais de l’aménagement forestier, de certification forestière et de bonne gouvernance. Ces activités sont économiques et sociales car elles contribuent à l’essor économique nationale, à la lutte contre la pauvreté au sein des communautés riveraines et à la création de nombreux emplois faisant de ce secteur le deuxième pourvoyeur d’emplois après la fonction publique. En effet, les emplois créés dans le secteur forestier sont estimés actuellement à 7 000 emplois directs et 10 000 emplois indirects. Les salaires et les infrastructures créés à travers les activités de ce secteur permettent un développement socio-économique et le désenclavement de l’arrière- pays. Il est de notoriété publique que, de nos jours le bois, autrement dit « l’or vert », se place au second plan de l’économie nationale après le pétrole dit « or noir » , 

Quel bilan pourriez-vous faire des grands chantiers accomplis et quels sont les chantiers à venir ?

Les réalisations majeures accomplies, dans notre pays dans le secteur foret, peuvent être citées pèlemêle ainsi qu’il suit :

⁃ la poursuite de l’aménagement forestier et la certification des concessions forestières ; 
⁃ la création des nouvelles aires protégées, avec un accent particulier sur les aires marines protégées, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, lesquelles constituent une fierté nationale ;
⁃ la promulgation d’un nouveau code forestier avec des réformes très significatives comme le partage de production de bois en grumes et la transformation plus poussée du bois à travers une  interdiction totale et formelle d’exporter des grumes ;
⁃ la signature de nombreux baux emphytéotiques et conventions pour la mise en œuvre du Programme National d’Afforestation et de Reboisement ;
-la formation de 21 jeunes congolais dans les métiers du bois en vue de la concrétisation de la politique de transformation plus poussée des ressources ligneuses.

Sous couleur des perspectives, il sied de mentionnerparticulièrement ; - la promulgation des lois sur le partage de production et la création d’une Société nationale ayant pour mission de gérer la part des grumes revenant à l’Etat ; - l’arrimage à la nouvelle législation, autrement dit au nouveau code forestier, des conventions d’exploitation et d’aménagement, actuellement en cours, conclues entre le Gouvernement de la République et les opérateurs économiques du secteur forets.

Le Président Dénis Sassou Nguesso a lancé un appel à l’instauration d’une décennie de l’afforestation. Où en est ce projet ?

Visionnaire, SEM. Denis Sassou-N’GUESSO, Président de la République, Chef de l’Etat, a lancé l’initiative « Décennie Mondiale de l’Afforestation » lors de la COP 27 tenue à Sharm El-Shieck, en 2022, en Égypte. Elle a été endossée par le Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernements de l’Union Africaine au mois de février dernier, qui l’a baptisée « Décennie Africaine et Mondiale de l’Afforestation ». A ce jour, le Congo travaille avec la Commission de l’Union Africaine pour préparer la Conférence Internationale sur l’Afforestation et le Reboisement qui se tiendra assurément au mois de novembre prochain, à Brazzaville, en vue de lancer officiellement cette initiative. D’ores et déjà, une réunion régionale est prévue sur ce sujet à Addis Abeba, au siège de l’Union Africaine, au début du mois de juin prochain. Pour revenir à l’Initiative elle-même, j’aimerais insister sur le fait que sa mise en œuvre dans notre pays permettra de renforcer le Programme National d’Afforestation et de Reboisement. C’est dans cette perspective que la République du Congo continue à signer des partenariats avec des investisseurs pour réaliser le Million d’hectares de plantations forestières et agro-forestières prévus dans le cadre du PRONAR, à réaliser dans les réserves foncières de l’Etat délimitées et affectées pour l’atteinte de cet objectif.

Ces dernières années, vous avez multiplié les rencontres avec les organisations internationales et des diplomates étrangers en poste à Brazzaville. Pourquoi ? 

Les rencontres avec les organisations internationales et les diplomates étrangers à Brazzaville peuvent revêtir plusieurs objectifs. Cela peut inclure le renforcement des relations bilatérales et multilatérales, la promotion des intérêts de notre pays sur la scène internationale, l'échange d'informations et de bonnes pratiques, ainsi que la recherche de financement, de soutien techniques et de partenariats pour des projets spécifiques liés à l'économie forestière et à la conservation de la biodiversité. Les problématiques de notre secteur sont d’actualité et importantes pour la survie de la planète, c’est pourquoi elles suscitent autant d’intérêt, par ce qu’en plus, les forêts du Bassin du Congo représentent les solutions basées sur la nature dans le cadre de la lutte contre le changement climatique.

Changement climatique, déforestation, déboisement, ces termes parlent-ils aux Congolais lorsqu’on sait qu’un élan climato-sceptique gagne de plus en plus de terrain sur les réseaux sociaux et même dans les discours de certains politiciens ? Que faites-vous face à cela ?

Actuellement les conséquences et les impacts du changement climatique sont perceptibles dans la vie courante des populations, lesquelles sont désormais conscientes qu’un dérèglement des saisons s’est produit. Même si les termes tels que changement climatique, déforestation et déboisement peuvent ne pas être familiers à tous les Congolais, en particulier ceux qui ne sont pas directement impliqués dans les questions environnementales, nous pensons que les efforts de sensibilisation du grand public qui sont entrepris par le Gouvernement sur les enjeux environnementaux, participeront à promouvoir une prise de conscience collective. Face à l'émergence de l'élan climato-sceptique de certaines personnes et personnalités politiques, faut reconnaitre que de nombreuses puissances économiques du monde privilégient leur essor économique à la préservation de l’environnement. Mais ces climato-sceptiques sont rattrapés par les événements climatiques extrêmes survenus ces derniers temps dans plusieurs zones géographiques de la planète et les effets néfastes du changement climatique. A titre d’illustrations, quel congolais ne se plaind-il pas au regard des fortes températures de chaleur qui sévissent ces derniers temps ? Et que dire des nombreuses pluies diluviennes occasionnant çà et là, à travers la planète des inondations avec perte des biens et vies humaines ?

Voyez-vous ! notre pays est couvert de forêts à 69%. C’est dire que, chez nous, l’on ne saurait parler d’environnement sans évoquer les forêts. C’est pourquoi, en tant que ministre de l'économie forestière, je m'efforce, sous la conduite éclairée de Monsieur Anatole Collinet MAKOSSO, Premier Ministre, Chef du Gouvernement, de mettre en œuvre les politiques et réglementations en vigueur visant à promouvoir la durabilité des écosystèmes naturels. Cela inclut l'adoption des réglementations strictes pour la gestion des ressources forestières, la promotion des pratiques de gestion durable des forêts et la recherche despartenariats internationaux pour soutenir les initiatives de conservation et de lutte contre le changement climatique.

Que peut-on retenir de la participation congolaise, début mars 2023, au One Forest Summit à Libreville ? 

La participation congolaise au One Forest Summit à Libreville, au début du mois de mars 2023, a permis de renforcer l'engagement du Congo en faveur de la protection de l'environnement et de la lutte contre le changement climatique. Lors de ce sommet, des discussions ont eu lieu sur des questions telles que la préservation des forêts, le développement durable et la transition vers une économie verte. La participation du Congo a permis de partager les efforts et les réalisations du pays dans ces domaines, ainsi que de renforcer les partenariats avec d'autres acteurs internationaux tels que la France, l’UNESCO, l’Organisation Internationale de la Francophonie et d’autres partenaires. L’un des résultats importants de ce Sommet est laDéclaration concernant la création d’une coalition intergouvernementale pour l’usage durable du bois et des matériaux bio-sourcés dans la construction, que le Congo a été invité d’endosser par le biais de ma modeste personne. 

Vous avez succédé à Mr. Henri DJOMBO qui aura passé 18 ans à la tête de l’actuel ministère de l’économie forestière. Que peut-on vous souhaiter ? La même longévité à ce poste ? 

La fonction de Ministre est nominative, et non élective. Par conséquent, on ne parlerait pas, dans pareil cas de mandat, mais plutôt de longévité à ce poste. A ce propos, je disais plus haut que cela dépend du pouvoir discrétionnaire de l’Autorité suprême.  On peut me souhaiter d'avoir autant d'impacts et de succès que mon prédécesseur, Mr. Henri DJOMBO, qui a dirigé ce ministère pendant 18 ans. Mon objectif principal est de continuer à travailler en faveur d’une meilleure gouvernance du secteur forestier, de la mise en œuvre des réformes introduites par le nouveau code forestier et d’assurer la gestion durable des écosystèmes forestiers; mais également de promouvoir la conservation des ressources forestières afin que la mise en valeur raisonnée de celles-ci, contribuent au développement socioéconomique de notre pays de manière équilibrée et respectueuse des normes établies. 

Propos recueillis par Adrien Meunier.

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